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Au rive gauche
10 juin 2011

Il faut que jeunesse se fasse

les_r_volt_s_livreExtrait : "En faisant leur toilette, le matin, ils avaient dressé le plan de cette suprême attaque. Il fallait que leur mère leur fournît l'argent nécessaire. Personne d'autre ne pouvait les sauver. Ainsi ils paieraient Havas l'après-midi et remettraient adroitement l'argenterie à sa place. Tibor irait au bureau militaire passer la visite pour partir comme engagé volontaire et la bande se dissoudrait le soir même. Aucun d'eux n'avait fait allusion aux événements de la nuit. Lajos avait emmené Tibor à la maison, l'avait déchaussé et couché comme un malade. Il avait même bordé son lit et attendu assis auprès de lui, qu'il fût endormi. Épuisé, Tibor s'était laissé faire. Un peu plus tard, il s'était levé, s'était assuré que Lajos dormait dans son lit et avait gagné furtivement le lavabo pour s'y savonner les lèvres et s'y rincer longuement la bouche, avant de se recoucher.
— Que voulez-vous que je vous réponde? dit la mère. Vous ne me racontez rien. Je suis là, couchée, impotente, prête à mourir à chaque instant et, vous, vous rentrez au petit jour, par cette maudite fenêtre! Je ne sais même pas si tu as passé ton examen, mon petit Tibor... L'échec de Tibor, et tout ce qui s'y rapportait était tellement loin de leur pensée qu'ils durent réfléchir un peu avant de répondre.
— Où est le diplôme, mon fils? poursuivait la mère. Le manchot regarda son frère et, comme si leur mère n'était pas dans la chambre, il encouragea Tibor :
— Tu verras qu'elle te donnera de l'argent, Tibor. Crois-moi. Elle t'en donnera, j'en suis sûr, il le faut...
— On ne nous a pas encore remis les diplômes, dit-il, pour la consoler...
— Je sais que tu as besoin d'argent, mon petit....
— Il n'y aura pas de banquet,  répondit Lajos.  On organise une fête champêtre.

— Une fête champêtre? Encore des innovations! dit la mère d'un ton réprobateur. Naturellement vous vous y enrhumerez. Lajos, tu prendras ton manteau.
— Mère, dit Lajos, à la guerre, je me suis couché chaque nuit, pendant quatre mois, dans un fossé, sous la pluie. Tu n'étais pas là pour me recommander de mettre mon manteau. Pourquoi me dis-tu de le faire maintenant ?" S. Maraï

affreux_sales_et_mechants_afficheAyant appris tout récemment qu'un autre villageois que moi avait écrit un livre, je n'eus de cesse de vouloir entrer en contact avec lui. Quelques minutes seulement après avoir raccroché mon téléphone, hier, beaucoup de choses m'envahirent l'esprit. Celles notamment qui consistaient dans le fait de me dire que rien n'avait changé, depuis notre adolescence. Que les clivages qui étaient les nôtres, alors, étaient là intacts.
Aîné de sa famille, à l'instar d'Abel mon frère récemment décédé, J.L. ne m'a cependant que peu connu. Contrairement à moi qui, loin derrière lui, ne perdit rien de ce qui pouvait lui arriver. Je m'attendais en conséquence à moins de familiarités de sa part.
Certes il avait bien aperçu quelque chose émanant de moi. Mais, disait-il, il avait constaté "tant d'erreurs" de ma part qu'il n'avait pas poussé plus avant sa lecture. Notamment le fait que je traite notre cousin commun et abbé Paul "d'hurluberlu". Là, me suis-je dit, quelque peu soulagé, nous avons davantage affaire à quelques divergences, qu'à ce qu'on pourrait appeler des contre-vérités. Ouf ! C'est alors qu'il me revint à l'esprit que lorsque j'étais enfant nos deux clans familiaux ne s'aimaient pas, c'est le moins qu'on puisse dire ! Sans toutefois être capables de nous en donner un début d'explication. Puis, les choses ne s'arrangèrent pas à l'adolescence, tout au contraire !
Autre sujet de nos divergences, précisait-il : la place ainsi que l'image péjorative que j'attribuerais à mon propre père. Lui, au contraire, se souvient d'un homme des plus avenants, en rapport au sien. Là, je décidai de résister quelque peu, tout en le renvoyant à sa problématique paternelle. Dès lors, il ne fut pas long à me citer quelques anicroches, du même tonneaux que les miennes. Bref, mon envie de le rencontrer est plus grande que jamais.
C'est ainsi que j'en vins à repenser aux "Révoltés" de Maraï, ainsi qu'au film ci-contre. Tous deux nous montrent de jeunes hommes excédés, prêts à tout, en butte sexuellement à une autorité paternelle ou à son absence, avec des conséquences identiques. À savoir : une révolte adolescente à laquelle seule la rencontre d'une fille saurait mettre fin, et encore ! Pour ce faire, nous courrions et écumions les bals de la région. Ce, après des semaines de travail plus que chargées en horaire de travail et en étant surtout entourés que d'adultes. L'allongement de la scolarité obligatoire, ensuite, déplacera ce problème spécifiquement masculin, du côté des collèges et des lycées. Là, où contrairement aux apparences, la promiscuité ne fit qu'accentuer les clivages sexuels, sans pour autant permettre de les dépasser. Si toutefois c'est jamais possible. Bonjour les addictions !  >> Lire encore

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