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Au rive gauche
13 avril 2019

Mais que diable allait-il faire dans cette galère ?

Eugene-OneguineLe rêve donc s'occupe la pensée freudienne, le rêve qui se forme dans le sommeil, est provoqué par des désirs que l'être conscient ne s'avoue pas […].
Il n'en va pas ainsi dans la sorte d'imagination que je me propose d'étudier. […] Ce que j'appellerai l'imaginaire métaphysique est un ensemble de récits que l'on se fait, de mythes auxquels on tente de donner foi, sur un arrière-plan de figures jugées divines ou dotées sans qu'on en prenne conscience de caractéristiques qui sont le fait du divin. [...] G. B.
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Cet-obscur-objet-du-desir

Édito
Las d'attendre chez lui, au début d’un de ces après-midis pendant lesquels il va forcément se passer quelque chose, Stéphane décide d'arriver délibérément en avance au CLA. Là, où aura lieu la conférence de C.L.C. intitulée : "L'instant poétique". Un lieu où tous deux ont tacitement "rendez-vous". Un face à face, chargé en émotion, quand bien même l'avait-il souhaité de tous ses vœux cette rencontre. Surtout, depuis la lecture des plus déconcertantes de : "Blesse, ronce noire", un roman de cet auteur. Son plus grand succès, dit-on. Un récit - aussi poétique que faire se peut – d'ébats, des plus platoniques, entre un frère et une sœur, qui lui procura un émoi certain. Fictive dans sa forme, l’évocation de jeux érotiques, infantiles, se déroulant dans des endroits écartés de la vie communautaire, l’avaient renvoyé à ceux qu'il eut jadis, bien réels ceux-là, avec une petite voisine. "Décidément c'était osé, aussi bien du point de vue des héros que de l'auteur", s'était-il fait la remarque. Certain qu'un jour il arriverait, lui aussi, à s'y référer, les évoquer, sans ne jamais blesser personne.
Mais, pourquoi diantre cette imperceptible sensation qui enfle, monte en lui, comme en un rêve ? "Il s'agit surtout, pensa-t-il, de donner le change à une angoisse certaine, à peu de frais". À moins que ne soit que propension à désirer - tout autant qu'à craindre - la nouveauté, chez des gens originellement asservis, n'ayant rien de mieux à faire qu'être disponibles. À jouir du temps qui passe.
Une "confrontation", se prépare néanmoins, en présence de témoins silencieux, non concernés. "Comme au théâtre", se précise-t-il. Qu'il le veuille, ou non, ce "sentiment d'étrangeté", n'est pas l'effet du pur hasard. Tout compte fait, Stéphane est là, bien là et y restera. Même, s'il s’en veut peut-être déjà d’y être venu. "Décidément, on se défend toujours de quelque chose", se murmura-t-il. Obsédante, l'émotion subsistera étonnamment une fois celui-ci entré dans la salle, augmentée d'un zest supplémentaire. Comme si notre "ami", se plaça délibérément en compétition avec la star du jour ? "De sorte que c'est toujours le moi, la vedette de tout show", se dit-il. De quel côté qu'on soit de la barrière.
Encore qu'il ne lui suffise de deux ou trois mots, échangés à la volée avec l'une des futures auditrices, affairée elle aussi à repousser momentanément un léger malaise. Sans l’annihiler, pour autant.
Soudain, un antagonisme, tout ce qu'il y a de plus rampant, s’instaure avant coup, entre un public impatient et l'orateur tant attendu. Toujours aussi ému, Stephane se surprend à rechercher quelques visages connus. Sans grand succès de ce côté. Il n'en voit que deux, affairés, eux-mêmes, à dissiper la même chose que lui. Vaincu, il se dit "qu'une rivalité interpersonnelle en génère certainement toujours d'autres".
Enfin, le vieil auteur arrive, sans se presser, ni leur sourire non plus. Tel un homme sur qui quelque chose de réfréné pèse de tout son poids depuis longtemps. Après une inutile et automatique vérification d’usage des micros, l'orateur se lance dans une lecture d’emblée monocorde.
Sans vie, presque. Sans se départir d'une lenteur voulue, d'une subliminale tonalité, ni n'avoir préalablement dévisagés son auditoire.
Puis ce fut une véritable surprise que de l'entendre versifier, un texte préalablement écrit, dans un style qui lui est propre. Aussi recherché que le personnage. Une appréciation qui tendrait à prouver que Stephane résiste intérieurement à "l'aura" de cet écrivain connu ? Telle une soudaine, imperceptible et jalouse sensation d'envie, sans qu'il ne puisse la dénier. L'effet de surprise passé, une impression de "déjà vu" s'immisce dans sa tête.
Corroborée, si besoin était, par les souvenirs de la lecture plus récente de Bethsabée, un de ses derniers titres. Le roman des plaisirs ancillaires de Rembrandt et sa servante, devenue ensuite sa seconde compagne.
Au fond, se surprit-il à penser "il se pourrait que le corps, qui obsède tout homme, ne soit que celui de la mère, voire d'un substitut de celle-ci".
Pessimiste l'essayiste définit enfin "L’instant poétique", comme étant le moment où l'intérêt du lecteur et la motivation de l'auteur se rejoignent. Se retrouver en nous-mêmes, la conscience de soi, la solitude de l’homme…, soit autant de leitmotivs chers à l'orateur.
Un récit à la voix toujours apaisante, concordante, ronronnante, dominera cet exercice de style déclamatoire de C.L.C.
Lequel s'efforce de dominer, de maîtriser son expression, au décryptage du poème, "comme un musicien interprète une composition musicale", dixit lui-même. Une maîtrise, afin de ne rien laisser s'échapper de lui-même.
Il ne fut question que de "Chant des poussières" de François Migeot, Et Stéphane, en l'absence de débat, d'estimer que ça suffisait.

 Eugene-Oneguine-texte-finL'art-d'aimer-texte-fin

 

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