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Au rive gauche
15 septembre 2011

"J'ai perdu mon Eurydice..." (Orphée)

À Mme George Sand, 01/01/1837
..."D'abord lorsque les pressentiments paternels m'arrachèrent aux steppes de la Hongrie, où je grandissais libre et indompté..., au sein d'une sociétélettre_bachelier_musique_livre brillante qui applaudit aux tours de force de celui qu'elle honora du glorieux et flétrissant stigmate de PETIT PRODIGE... Plus tard, lorsque la mort m'eut enlevé mon père, et que revenu seul à Paris je commençais à pressentir ce que pouvait devenir l'art, ce que devait être l'artiste.. Mais, je m'oublie déjà, comme les vieillards, à vous parler de mon enfance... Qu'importé ? Continuons... La pauvreté, cette vieille entremetteuse entre l'homme et le mal, m'arrachait à ma solitude contemplative... Jeune et excessif comme je l'étais alors, je souffrais douloureusement... J'exécutais alors fréquemment, soit en public, soit dans des salons (où l'on ne manquait jamais de m'observer que je choisissais bien mal mes morceaux), les œuvres de Beethoven, Weber et Hummel, et, je l'avoue à ma honte, afin d'arracher les bravos d'un public toujours lent à concevoir les belles choses dans leur auguste simplicité, je ne me faisais nul scrupule d'en altérer le mouvement et les intentions ; j'allais même jusqu'à y ajouter insolemment une foule de traits et de points d'orgue, qui, en me valant des applaudissements ignares, faillirent m'entraîner dans une fausse voie dont heureusement je sus me dégager bientôt... Vers ce temps, j'écrivis plusieurs morceaux qui se ressentaient nécessairement de l'espèce de fièvre qui me dévorait. Le public les trouva bizarres, incompréhensibles... Toutefois, je voudrais qu'il me fût permis de dire quelques mots... Libre alors à la critique d'intervenir pour blâmer ou louer la manifestation plus ou moins belle et heureuse de la pensée... - Le système de Law est adopté pour la critique ; le papier-monnaie des louanges se fabrique et s'accepte avec une incroyable facilité. Mais, malheur à l'artiste ou à l'écrivain qui se paie de ces valeurs mensongères : il s'endort complaisamment dans sa célébrité factice et se réveille face à face avec quelques articles de journaux creux et vides, tout étonné que le public ne se paie plus, lui, de ces belles phrases si redondantes, de ces beaux mots dorés dont rien ne subsiste que le ridicule. " Franz Liszt

maitre_de_musique_filmMon approche de l'opéra et de la musique classique, si je puis m'exprimer ainsi, je la dois essentiellement au militantisme politique. Encore que mon enfance ait été, d'une certaine manière, marquée de ce sceau, mon père étant l'organiste du village. Nous en parlions à table, les seuls lieu et moment où la parole de notre père avait le loisir de nous atteindre, si toutefois notre attention n'était pas attirée ailleurs, en vertu du principe qui veut que personne ne soit prophète en son pays. Ensuite, il y eut mes frères aînés qui s'y adonnèrent" quelque peu, mais en dilettantes seulement. L'orgue, l'accordéon furent les instruments que j'aimai à entendre de préférence pendant longtemps. Et puis, vint ma période citadine, celle qui me donna à découvrir la culture bourgeoise, avant d'espérer pouvoir la dépasser un jour. Bref, les Mozart, Verdi et autres compositeurs du même tonneau, tous issus de la bourgeoisie montante, firent désormais partie de mon environnement musical. Sans entrer dans le débat qui consisterait à discuter de la vraie musique, par opposition à toutes ses variantes plus "populaires" de la variété, il se trouve que comme en littérature, je fis un choix principiel (Philos : Relatif au principe, comme cause première d'une chose), dirais-je. Et décidai que, pour autant que cela se puisse, mes enfants recevraient une éducation musicale digne de_milie ce nom (voir Émilie ci-contre). Encore faut-il baigner dans un milieu approprié pour en faire son quotidien. Comme pour tout, suis-je tenté de dire.
C'est encore et surtout au cinéma, à quelques exceptions près (si toutefois un opéra filmé demeure toujours un opéra, pour les esthètes) que je dus un accès tout relatif à cet art si particulier et toujours réservé à une élite. En revanche, il me fut donné d'assister à quelques opéras (en plein air de surcroit), au cours des Chorégies d'Orange. Lorsque le tout Paris culturel se transporte dans le midi de la France. Encore que le prix des places devienne de plus en plus cher, succès oblige. Passons sur cet aspect qui n'est pas le seul obstacle à la diffusion d'une musique difficile d'accès.
Sans éducation musicale ni même me considérer comme un amateur éclairé, je le répète, il m'apparut rapidement que cet art essentiellement vocal était le summum de ce qu'un humain pouvait produire physiquement ; après des années de travail et sous la direction d'un "chef", il va sans dire. C'est ainsi que j'eus, moi aussi, ma période Verdi, "compositeur de l'unification italienne" et du nationalisme par excellence.
Dans le désordre citons quelques opéras qui par certains côtés comptent encore : Aïda, où trahison et fidélité conduisent à la mort. L'Otello, de Verdi (Alias P. Domingo) qui se consume, pour avoir cédé à la jalousie. Sans oublier Don Carlos (d'après F. von Schiller) au sujet du conflit père/fils, ce dernier ayant l'âge de la jeune reine, contrairement au roi. La Tosca, de Puccini, où le sublime rejoint le nationalisme italien triomphant dans la mort. Tandis que la Carmen, de Bizet, elle, nous ramène dans l'arène sanglante. Contrairement au Don Giovanni (film de J. Losey), qui flirte éternellement avec la séduction platonique. Idem pour La Traviata (film de F. Zeffirelli), côté féminin cette fois. Le retour d'Ulysse dans sa patrie (Monteverdi) rend un double hommage à la virilité masculine et à la fidélité féminine. Tandis que Norma, elle, refuse le diktat de Rome au sujet de ses fils. La bohème, ou les amours petits-bourgeois naissants etc. 
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