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Au rive gauche
16 mai 2011

Ni dieu, ni maître

Pierre Mendès France, débat avec J.M Jeanneney RMC 11/06/68
Sur sa participation au meeting de Charletymeeting_charlety
"Il est vrai que j’ai assisté à la réunion de Charlety, et je ne le regrette pas ! Cela ne veut pas dire – qu’il n’y ait pas eu de malentendu – cela ne veut pas dire que je sois d’accord avec tout ce qui a été dit à Charlety. Cela ne veut pas dire d’ailleurs, que tous les hommes et toutes les femmes qui étaient à Charlety – il y en avait des dizaines de milliers – aient été d’accord entre eux (…).
Seulement ma présence à Charlety […] résultait d’un sentiment très profond chez moi. Toute ma vie, toute ma vie, j’ai pensé qu’une politique de progrès, qu’une politique de mouvement, qu’une politique recherchant l’amélioration de l’avenir du pays et des réformes de structures en rapport avec son avenir, toute ma vie j’ai pensé que cela n’était pas possible autrement qu’en contact avec la jeunesse. Et lorsqu’un mouvement se produit avec une telle ampleur, une telle spontanéité, une telle profondeur que celui auquel nous avons assisté au cours des deux derniers mois, on ne peut pas y être insensible. Tant qu’il y aura des jeunes qui se sentiront malheureux – et il y en a qui se sentent en effet malheureux aujourd’hui – qui chercheront une meilleur voie pour leur avenir, même s’ils se trompent ici ou là – et je ne me gênerai pas pour le leur dire – je serai de cœur près d’eux, et je serai contre la Garde mobile, les CRS, le matraquage. Car ce n’est pas par la matraque que l’on s’explique avec les jeunes, ce n’est pas par la matraque que l’on met fin à leurs meeting_charlety_mendesaspirations et à leurs espoirs […]. Je sais, parce qu’en effet j’en ai la preuve dans mes contacts avec ces jeunes, et entre autre à Charlety […] je sais qu’il y a une jeunesse qui cherche une voie, une voie dans le sens du progrès, dans le sens de la démocratie, dans le sens de l’émancipation. Et je ne peux pas ne pas être profondément sensible à cette aspiration et à ce besoin, et je ne le regrette pas, dans cette période, d’avoir été à côté des jeunes, et quoi qu’il arrive, et quelque reproche que l’on me fasse, c’est toujours de leur côté que je serai. Fin de citations

En mai 68, les occupations d’usine étaient le plus souvent bon enfant, je le répète. Contrairement à ce qui se passa, un an auparavant, dans les usines du groupe Rhodiacéta ainsi qu’aux chantiers navals de St Nazaire, où les ouvriers s’étaient barricadés et avaient armé les lances à incendie. Puis, n’en furent délogés que par les C.R.S., après qu’un syndicaliste n’ait ouvert une porte de l’intérieur (pour ce qui concerne l’usine de Besançon), il est vrai… An1_film
La reprise du travail en 68, après que les syndicalistes aient bradé le mouvement sera, on le verra, beaucoup moins pacifique. Elle fit même deux morts à Peugeot Sochaux.
Quant au meeting de Charlety, porteur de quelques illusions, il fut organisé par le syndicat étudiant UNEF et attirera beaucoup monde, ainsi qu’on le voit sur la photo du haut, de même que du "beau monde" comme le montre la photo du bas.
Cette tentative, avortée, de créer un parti de masse à la gauche du PCF était presque condamnée d’avance, sans que nous ayons véritablement à le regretter maintenant. En revanche, pour Mendès France et Michel Rocard on le voit mieux aujourd’hui, tout cela n’était que volonté de récupération du mouvement.
Mitterrand, lui, la réalisera en 81 avec autant d’illusions de la part de la gauche que j’en avais eu moi-même au moment de Charlety. Bref, ceci pour dire qu’on n’empêche pas un politicien, opportuniste par définition, de s’immiscer là où il pense avoir quelque chose à y gagner. Même pour un vieux cheval de retour de la 4e république, comme P.M.F. Aucune honte ne les étouffe !
Pour ce qui me concerne, Charlety sonnera le glas de toute tentative de faire quelque chose de nouveau, en dehors des partis traditionnels. À moins de me tourner vers les révolutionnaires, ainsi que je le ferai quelques années plus tard. Juste après la lutte "des Lip", pour tout dire. Laquelle n’aurait jamais pris les formes qu’elle eut sans le préalable de 68. Les années 70/80 resteront marquées de cette empreinte que Mai 68 laissera derrière lui, telle une comète.
En conséquence de quoi, le gouvernement fermera "les maisons pour tous" et supprimera l’enseignement de la philo, ferment des idées révolutionnaires à ses yeux ! >> Lire encore

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T
A la manière des ouvriers autodidactes du 19° siècle, rédigeant le soir, après une journée épuisante leurs pamphlets, leurs feuilles, dans lesquelles ils expliquaient à leurs compagnons d’usine les mécanismes de leur asservissement, jour après jour les billets de ce blog nous rappellent que la lutte des pauvres, des sans-noms, des gens de riens, soumis à la minorité bourgeoise jamais ne s’arrête. Contre les médias officiels aux ordres, qui voudraient nous faire croire à « la fin de l’histoire », qu’ « il n’y a pas d’autre alternative », que l’utopie communiste est un mauvais rêve, ces textes dont les auteurs refusant l’injustice et l’humiliation ont voulu vivre debout, nous montrent que l’histoire est toujours en marche. L’exploitation capitaliste, le colonialisme et ses guerres prédatives, continuent, mais nous pouvons puiser dans la riche histoire du prolétariat, dans l’histoire de ses victoires et de ses échecs pour nous en inspirer et cultiver l’espoir de remplacer la société capitaliste par une société fraternelle.
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